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Le Livre, tome II, p. 253-269

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 253.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 253 [269]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 254.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 254 [270]. Source : Internet Archive.

qui possédait, outre les langues anciennes, les langues vivantes les plus usuelles, parlant l’anglais et l’allemand aussi couramment que le fran­çais[253.1], a publié quantité d’ouvrages, des études historiques, littéraires et scientifiques notamment, et des tra­ductions[253.2]. Son obligeance et sa générosité étaient, comme son aimable caractère, sa courtoisie et son esprit, connues et appréciées de tous, et l’on est allé jusqu’à dire que si Boulard est devenu un bouquineur enragé, ce fut principalement pour rendre service aux bouquinistes[253.3].

[II.269.253]
  1.  Cf. Numa Raflin, loc. cit., pp. 57-58.  ↩
  2.  On en trouve la liste dans Quérard, la France littéraire, t. I, pp. 456-457.  ↩
  3.  On a prétendu aussi que Boulard n’était pas très scrupuleux en fait de livres, et en dérobait volontiers, même dans les loges de concierge. C’est le typographe Alkan aîné qui conte la chose, dans sa brochure sur Édouard-René Lefebvre de Laboulaye, Un Fondeur en caractères, membre de l’Institut (p. 15). Voici cette anecdote, à peu près textuelle, que je ne reproduis ici que pour faire entendre tous les sons de cloche, et dont je laisse l’entière responsabilité au « Sonneur » : Un matin, Boulard, qui était lié avec un proche parent de M. de Laboulaye, M. Lefebvre, notaire à Paris, vint pour lui rendre visite. Il entre dans la loge du concierge, où personne ne se trouvait, puis monte chez son ami le notaire. A peine est-il dans le cabinet de celui-ci, que le concierge arrive tout effaré, et, s’adressant à voix basse au notaire, lui demande s’il connaît bien le monsieur qui est avec lui en ce moment. « Si je le connais ! Réplique maître Lefebvre sur le même ton. C’est mon meilleur ami, un ancien collègue à moi…. — Ah ! c’est que… c’est que je vais vous dire, fait le concierge, d’une voix toujours discrète. Un locataire de la maison m’a prêté un volume, et ce volume, que j’avais laissé sur ma table il y a un instant, je ne le trouve plus. Or, il n’y a que ce monsieur qui a pénétré dans ma loge…. Ce volume fait partie d’un ouvrage qui va être ainsi décomplété : cela me met vis-à-vis du locataire dans le plus cruel embarras. — Écoutez, reprend le notaire, mon ami va partir tout à l’heure ; suivez-le jusqu’à sa demeure et entrez avec lui. Vous lui direz : « Monsieur, je suis le concierge de M. Lefebvre. Est-ce que, par un simple effet du hasard, vous n’auriez pas emporté un livre qui était sur ma table ? » Ce qui fut dit fut ponctuellement exécuté. « Attends ! répondit maître Boulard, qui, sans se déconcerter le moins du monde, plongea la main dans une de ses grandes poches et en tira le volume, tiens, le voilà, ton livre ! Et emporte-le bien vite ! » ajouta-t-il en remettant au concierge une pièce de cent sous pour l’indemniser de son dérangement. (Cf. mon volume Amateurs et Voleurs de livres, pp. 21-23. Paris, Daragon, 1903.)  ↩

Le Livre, tome II, p. 248-264

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 248.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 248 [264]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 249.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 249 [265]. Source : Internet Archive.

rivaux n’allaient-ils pas le pousser au delà de ses forces ? Comme il respirait largement, après ces victoires si chèrement achetées, et comme il s’enfuyait bien vite avec sa conquête ! Un jour, il m’en souvient, je le rencontrai rue de Seine. Il déjeunait, en marchant, d’un petit pain d’un sou, et feuilletait avec ivresse un petit in-douze, relié en parchemin, merveille typographique de Jean de Tournes, célèbre imprimeur lyonnais. Le brave Gaullieur venait, sans hésiter et tout ravi de l’aubaine, de payer ce bouquin quelque chose comme dix louis. Ah ! l’heureux homme, et la belle journée ! et que ce petit pain d’un sou était bon à manger ce matin-[248.1] ! »

[II.264.248]
  1.  Napoléon Ier aurait droit aussi de figurer sur cette liste des « passionnés du livre » ; il fut, selon l’expression de M. Gustave Mouravit (Napoléon bibliophile, Revue biblio-iconographique, janvier et février 1905, pp. 13 et 61-62), « bibliophile au meilleur sens du mot… ; il cherche exclusivement dans le livre ce pour quoi, avant tout, un livre est mis en lumière, savoir : l’acquisition des notions qui font défaut à l’esprit, la rectification ou la confirmation des notions acquises ». Voici le témoignage fourni par M. Frédéric Masson et emprunté par lui à un livre, — une sorte de roman, il est vrai, — tout à fait oublié aujourd’hui, Napoléon en Belgique et en Hollande, 1811, par Charlotte de Sor [Mme Eillaux, née Desormaux] (Paris, Gustave Barba, 1838, 2 vol. in-8 ; cf. Quérard, Supercheries littéraires, t. I, col. 921-922 ; et Mouravit, loc. cit., avril 1904, p. 168) : Oui (c’est Napoléon qui parle), je trouvais le moyen de payer la pension de mon frère. Savez-vous comment j’y parvenais ? C’était en ne mettant jamais les pieds au café ni dans le monde, en mangeant du pain sec à mon déjeuner, en brossant mes habits moi-même…. Je vivais comme un ours, seul, dans ma petite chambre, avec mes livres, mes seuls amis alors. Et ces livres, pour me les procurer, par quelles dures économies faites sur le nécessaire, achetais-je cette jouissance ! Quand, à force d’abstinence, j’avais amassé deux ou trois écus de six livres, je m’acheminais, avec une joie d’enfant, vers la boutique d’un vieux bouquiniste qui demeurait près de l’évêché…. Souvent j’allais visiter ses rayons en faisant le péché d’envie. Je convoitais longtemps avant que ma bourse me permit d’acheter…. »  ↩

Le Livre, tome II, p. 076-092

Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 076.
Albert Cim, Le Livre, t. II, p. 076 [092]. Source : Internet Archive.

volumes in-8[076.1] », ouvrage qui devait paraître avec cette épigraphe tout à fait de circonstance : Alius alio plus invenire potest, nemo omnia[076.2].

« Lire, écrire, observer, penser, comparer, réfléchir, voilà ma vie, nous dit M. Albert Collignon (1839-….)[076.3]. Je suis avant tout un lecteur, un curieux, un témoin attentif de mon temps. Philosophe, j’aime à comprendre la raison des choses ; j’aime à dire ma manière de voir et à formuler mes jugements. En lisant, j’ai mes préférences ; mais, depuis Homère jusqu’à M. Verlaine, depuis Cicéron et César jusqu’à Frédéric II et à Napoléon, depuis Aristote jusqu’à M. Zola, j’ai voulu tout connaître ; j’ai tout lu la plume à la main, en notant mes remarques, mes réflexions et mes extraits. Mes cahiers, si nombreux, sont le résumé de ma vie ; ils forment aujourd’hui toute une encyclopédie littéraire, morale, politique, le Dictionnaire critique d’un homme de lettres. »

C’est qu’en effet la vie d’un véritable homme de

[II.092.076]
  1.  Quérard, la France littéraire, art. Peignot, t. VII, p. 10. Un autre fervent érudit, le célèbre bibliophile et collectionneur François Marucelli (1625-1713), laissa, à sa mort, un index général, en 112 volumes in-folio, de toutes les matières traitées dans les ouvrages qu’il avait lus. « Ce vaste répertoire, conservé en manuscrit à Florence, pourrait être d’une grande utilité aux savants, dont il faciliterait les recherches. » (Michaud, Biographie universelle.)  ↩
  2.  J. Simonnet, Essai sur la vie et les ouvrages de Gabriel Peignot, pp. 177 et s.  ↩
  3.  La Vie littéraire, p. 6.  ↩

Le Livre, tome I, p. 176-200

Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 176.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 176 [200]. Source : Internet Archive.
Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 177.
Pour suite de note : Albert Cim, Le Livre, t. I, p. 177 [201]. Source : Internet Archive.

V. Époque contemporaine

Un des hommes de notre temps qui ont le mieux connu les livres, qui en ont le mieux parlé, et ont le plus fait pour en répandre la connaissance et l’amour, c’est Gabriel Peignot (1767-1849) : son érudition, son jugement, son goût, sa méthode et sa puissance de travail, son ordre, sa clarté, toutes ses excellentes qualités sont aujourd’hui unanimement consta­tées[176.1].

[I.200.176]
  1.  Il n’en a pas toujours été ainsi. Voir, dans le Manuel du libraire de J.-C. Brunet, l’article Peignot : « Les productions bibliographiques de Peignot, quoiqu’elles soient un peu trop superficielles…. Au reste, toujours modeste dans ses écrits (conclut néanmoins Brunet), toujours rempli d’indulgence pour ceux des autres, cet estimable homme de lettres a dû rencontrer plus d’amis que de censeurs ; et d’ailleurs, il est juste de le reconnaître, ses ouvrages ont beaucoup servi à populariser la bibliographie. » Voir aussi l’article Peignot dans la Biographie universelle de Michaud : « On pourrait désirer aussi que Peignot eût souvent été plus sévère dans le choix de ses matériaux…. Du reste, la bonne foi et l’absence de prétention sont chez lui des qualités incontestables et précieuses. » « M. Peignot, l’un des plus savants et laborieux bibliographes de ce siècle. » (Quérard, la France littéraire, t. VII, p. 10.) « M. Peignot est un des savants qui ont le mieux mérité de la science bibliographique. » (Renouard, Catalogue d’un amateur, t. IV, p. 214.) « Ce judicieux Traité du choix des livres, de Peignot… ouvrage qui devrait être connu de tous ceux qui se vouent à la culture intellectuelle…. » (Mouravit, le Livre et la Petite Bibliothèque d’amateur, p. 109.) « Peignot a été le bibliographe le plus savant de ce siècle. Son érudition était immense. (Larousse, Grand Dictionnaire.) Etc. — On trouve dans les Curiosités de l’histoire des arts de P. L. Jacob, Notice sur le parchemin et le papier, p. 1 (Paris, Delahays, 1858), une note singulière, et que je signale ici, en raison même de cette étrangeté : « Nous n’hésitons pas, dit le bibliophile Jacob, à réimprimer sous notre nom quelques pages que nous avons publiées dans un grand ouvrage collectif [les Beautés du moyen âge et de la Renaissance (mœurs et arts), par MM. Émile Bégin, Champollion-Figeac, Depping, etc. (Parchemin, Papier), sans pagination ; Paris, à l’Administration du moyen âge et de la Renaissance, 5, rue du Pont-de-Lodi, s. d.] sous le nom du savant Gabriel Peignot, avec son autorisation formelle, en nous aidant de ses ouvrages, il est vrai, et en leur empruntant des passages textuels. Ç’a été de la part de l’illustre bibliographe une marque d’estime et de confiance que de nous permettre de lui attribuer un travail qu’il n’avait pas même revu ; nous ne croyons pas devoir plus longtemps lui laisser, après sa mort, la responsabilité de notre œuvre. » Tout ce que l’on peut dire, en réponse à cette réclamation en reprise de possession, c’est : 1º qu’il est regrettable qu’elle ne se soit pas formulée du vivant de « l’illustre bibliographe » co-intéressé ; 2º que de telles substitutions, fraudes et manigances n’étaient nullement dans les habitudes de l’honnête, laborieux et scrupuleux Peignot.  ↩