Le Livre, tome II, p. 267-283
Par Albert Cim le 22 oct. 1905, 14:43 - XII. Biblioclastes et bibliophobes - Lien permanent
On connaît la réponse catégorique et typique qu’Omar aurait faite à son lieutenant, lorsque celui-ci, après s’être emparé d’Alexandrie, lui demanda ce qu’il devait faire de la bibliothèque : « Si ce que contiennent les livres dont vous me parlez est conforme au livre de Dieu (le Coran), ce livre les rend inutiles ; si, au contraire, ce qu’ils renferment est opposé au livre de Dieu, nous n’en avons aucun besoin. Donnez donc ordre de les détruire[267.1]. » En conséquence, d’après cette légende, Amrou-ben-Alas les fit distribuer dans les bains publics d’Alexandrie, dont ils suffirent à alimenter le chauffage durant six mois[267.2], — quoique le papier, sans parler du parchemin, s’il est bon pour allumer le feu, ne convienne guère pour l’entretenir.
Nous avons parlé également du pape Grégoire le Grand (540-604), saint Grégoire, qui passe pour avoir livré aux flammes un grand nombre d’ouvrages anciens, Tite-Live notamment, et qui, s’il n’a pas commis ce massacre, en était bien capable, à en juger par le mépris qu’il affichait pour les écrivains de l’antiquité[267.3].
- Cf. ce que dit à ce sujet Jean-Jacques Rousseau (Discours sur les sciences et les arts : Œuvres complètes, t. I, p. 18, n. 1 ; Paris, Hachette, 1862) : « Supposez Grégoire le Grand à la place d’Omar, et l’Évangile à la place de l’Alcoran, la bibliothèque aurait encore été brûlée, » — en vertu du même raisonnement. ↩
- Cf. Larousse, op. cit., art. Omar Ier. ↩
- Cf. notre tome I, page 82. ↩